"L'ami retrouvé" de Fred Uhlman

Publié en 1971, L'ami retrouvé reste le plus grand succès et -selon quelques érudits- le plus grand chef d'œuvre du peintre allemand Fred Uhlman.

L'ami retrouvé est un très court récit, ce qui m'a d'emblée rendue méfiante -court est souvent le synonyme de succinct. Bref, mon a priori était tout à fait négatif, surtout que le style d'Uhlman est, pour ainsi dire, sans ambages et pas vraiment engageant.

En réalité, je n'ai commencé à apprécier ce petit roman qu'à la dernière ligne. Oui, L'ami retrouvé est un bon roman a posteriori. Curieusement, la toute fin m'a vraiment émue alors que je n'étais pas complètement entrée dans l'intrigue. Et c'est là toute la force de ces quelques lignes : le lecteur en ressort troublé -autant qu'après un Primo Levi décrivant par moult détails sa vie quotidienne dans un camp de concentration. On n'y apprend rien sur le nazisme et pourtant, on se sent menacé avec le narrateur par cette grosse bête qui se rapproche de plus en plus et dont le visage devient chaque jour plus distinct, jusqu'au mélancolique dénouement final.

La montée en puissance est en effet très bien gérée de la découverte des convictions de la famille de son ami par Schwarz jusqu'à son départ pour les États-Unis. Le rythme s'avère haletant durant les cinquante dernières pages. Jusqu'à la dernière ligne. En quelques mots, le lecteur accède à la compréhension : tout se lie devant ses yeux, les réflexions de l'auteur sur l'amitié, la description de Conrad, les émotions de ce narrateur si attachant, la neutralité du ton et la montée du nazisme.

Une portée ahurissante sans l'épuisement conféré par un Si c'est un homme. Simple et confondant.